mercredi 3 juillet 2013

High Expectations

Bon... C'est pas tout d'être en vacances et de se dire qu'on va se les gratter pendant deux mois. 

L'année scolaire étant achevée, il est grand temps de faire le bilan de ces 12 derniers mois qui ont marqué notre grand retour à Londres.

On va dire que d'un point de vue social, notre famille a été gâtée : nous nous sommes installés dans une résidence pleine de vie, d'enfants tapageurs, de rires étouffés, d'apéros improvisés, d'explorations allant du communal garden au garage et de rencontres animées au local poubelle. Nous adorons notre nouveau quartier, communément appelé "Frenchies Town", mais qui recèle de petites adresses bien ancrées depuis des années et qui font l'âme de ce no man's land entre Camden et Hampstead. Bref, que dire d'autre que nous sommes heureux et qu'on a rempilé pour une année supplémentaire. Faudrait pas se priver non plus...

Le seul pour lequel j'ai un doute, c'est Nain...

Nain, c'est le Premier, l'Héritier, celui qui a happé toute notre attention pendant 4 ans, soit 2 parents à l'affût d'une quelconque trace de génie, porteuse d'espoir d'un avenir sans faille et brillant. Durant ces 5 dernières années, j'ai observé, analysé, écrit avec tout le recul dont j'étais capable, m'émerveillant de sa vision du monde et riant de ses bêtises, cherchant dans le regard des autres s'il était normal... mais au fond, cette légèreté n'est qu'une façade qui cache une véritable angoisse.

Mari et moi, je pense que nous avons de grandes ambitions pour Nain : on aimerait qu'il réussisse partout - sports, maths, arts, danse, lecture, décrottage de nez - et qu'il soit suffisamment aimé et entouré d'amis afin de faciliter sa transition vers une plus grande autonomie, sans subir l'omniprésence de ses parents. Mais tout reste sous contrôle...

Seulement voilà, nous nous sommes pris une première douche froide lors de son évaluation de fin d'année. 

Le problème de Nain, c'est qu'il écoute einr... mais genre einr de einr en classe... Il plane à 10 000 et quand il atterrit, c'est la panique la plus totale. Nous nous attendions non pas à des éloges, mais au moins à un "OK ça roule". Et bien non, il fallut nous expliquer qu'il faudra qu'il cravache un peu pendant les vacances, qu'il apprenne ses putains de tables de mathématiques, qu'il s'applique en écriture cursive, qu'il avait pas le niveau en anglais et qu'il devait travailler sur son "self-confidence". Bam! me voilà bonne pour filer à la librairie acheter des cahiers de vacances....

Deuxième douche froide : étant le seul garçon dans une classe de 5, j'ai ainsi découvert que ses camarades de classe le mettaient à l'écart et qu'il jouait tout seul pendant les récréations... Ca cumulé aux vannes racistes de petits fachos en herbe, nos espoirs de le voir nouer de solides amitiés à l'école ont fondu pour faire place à des périodes de spleen.

Mille fois j'ai voulu le changer d'école et mille fois j'ai reculé... Pourquoi? Et bien parce qu'il a bien fallu nous rendre compte que Nain n'allait pas forcément être ce que nous voulions qu'il soit : bucheur comme son père mixé à un animal social comme sa mère.

Ainsi, est-ce que nous devons continuer à batailler pour qu'il soit si différent de ce qu'il est sous prétexte que la réussite doive passer par des diktats auxquels il ne pourra jamais s'adapter? Est-ce que nous le rendrons mieux dans ses pompes si nous maintenons la pression aussi bien académique que sociale?

Ch'crois pas non... en tout cas, vu comme ça...

Avoir de l'ambition pour ses enfants, c'est normal. Mais trouver la force de les accepter tels qu'ils sont, c'est encore mieux bien que beaucoup plus difficile et souvent en contradiction avec le premier point. Je l'avais pourtant déjà lu quelque part, ça me paraissait plein de bon sens mais mon angoisse me rendait incapable d'appliquer ce concept pourtant simple.

Je pense que je ne vais pas pouvoir lutter plus longtemps. Il va être tout simplement lui : très rêveur, gentil comme tout, aimant les plaisirs simples, un goût prononcé pour les Sciences mais aussi paresseux, buté, sensible, peureux et un goût prononcé pour l'Ipad! Quant à ses amitiés, 2 ou 3 super potes lui suffisent. Ca tombe donc plutôt bien...

Du coup, depuis quelques temps, j'ai arrêté de coller la pression à Nain, j'ai lâché le frein à main et je le laisse prendre son envol... Je me retrouve ainsi avec un pré-ado qui me contredit et me nargue, il me semble si loin ce temps où je pouvais encore le câliner, l'envelopper, le façonner... 

Plus rien ne peut l'atteindre maintenant que j'ai accepté ce qu'il est au fond : un pur casse-couilles... mais c'est mon casse-couilles ;)

En conclusion, Nain, nous avions le secret espoir qu'il deviendrait comme lui :



Mais en fait, il est plutôt comme ça....